Rendez Les Doléances ! est une association apolitique qui est née de l’initiative de citoyens engagés dans la vie de la cité, déterminés à rendre public les «cahiers citoyens» du Grand Débat National.
Après deux mois de crise sociale, d’occupation des ronds-points par les gilets jaunes, de protestation — parfois violente — dans toute la France, Emmanuel Macron, dans une lettre en date du 12 janvier 2019, invitait tous les Français «à transformer les colères en solutions» : s’engageait ainsi le Grand Débat National. Selon ses concepteurs, il s’agissait de «permettre à toutes et tous de débattre de questions essentielles pour les Français»: ils répondront massivement à l’invitation qui leur est faite de débattre, proposer, critiquer, rêver.
Durant deux mois, on assiste à une moisson d’idées, de doléances autour des thèmes arrêtés par le chef de l’État (fiscalité, modèle social, démocratie, institutions, transition écologique et diversité, immigration, laïcité). Cette masse d’informations constitue un véritable trésor national. Il s’agit d’une cartographie inédite de l’état du pays.
Le Président de la République Emmanuel Macron annonce dès le 27 novembre 2018 une «grande concertation de terrain». Il précise dans une lettre du 12 janvier 2019 adressée aux Français les modalités du Grand Débat et appelle les Français à y participer afin de sortir de la crise. Le Grand débat national s’est déroulé du 15 janvier au 15 mars 2019. En chiffres ce sont :
1,9 million de contributions sur la plateforme en ligne
Plus de 10 000 réunions locales
Plus de 16 000 Communes ayant ouvert des « cahiers citoyens ».
Environ 630 000 pages traitées
La moitié des rencontres ont été organisées par les élus, essentiellement les maires, l’autre par des associations
Deux engagements avaient été pris par le Président Emmanuel Macron.
Le premier : restituer aux Français ce trésor national, en procédant à la numérisation de l’ensemble des contributions, y compris les cahiers citoyens afin d’en permettre la consultation la plus large possible. Cet engagement n’a été que très partiellement honoré. En effet, selon la Bibliothèque nationale de France (BNF), en charge d’effectuer la numérisation, il a été procédé à la numérisation des contributions papier et de leur transcription (océrisation) lorsqu’elles étaient dactylographiées. Le nombre total de documents traités s’élèverait ainsi à 49 251 documents (dont 19 934 cahiers citoyens de 23 pages en moyenne), qui représentent 683 084 pages. Mais concrètement, ces documents ne sont toujours pas en ligne et ne sont donc exploitables qu’à partir de la consultation physique des archives déposées dans les centres d’archives départementales.
Le second : financer la recherche consacrée à ces documents en donnant les moyens à la communauté scientifique de procéder à une analyse sérieuse de ces milliers de documents. L’agence Nationale de la Recherche (ANR) lançait en février 2019 auprès des chercheurs un appel à manifestation d’intérêt sous la forme d’un «appel flash». Une cinquantaine d’équipes y ont alors répondu. Toutefois, là encore, les intentions ne se traduiront pas en actes: l’appel définitif n’a jamais été publié et les équipes constituées ont donc dû faire avec les moyens dont elles disposaient.
La promesse initiale du gouvernement était que tout devait être en transparence totale, consultable sur la plateforme par tout le monde; or les contenus des cahiers n’ont jamais été mis en ligne.
D’après l’État, les cahiers citoyens représentent des téraoctets de données, les héberger en permanence sur le site aurait été trop lourd à mettre en place (propos recueillis auprès du cabinet de Sébastien Lecornu par France 2 pour «l’œil du 20 heures» diffusé le 14 janvier 2020). Mais d’après Gilles Proriol (gérant de Cognito Consulting, l’une des trois entreprises mandatées par le gouvernement pour traiter les contributions), la raison invoquée n’est pas pertinente puisque l’ensemble des données tenaient sur leurs ordinateurs.
En réalité, l’État («L’Administration», citée sans plus de précision) aurait fini par reconnaître, après les relances de France 2, que la mise en ligne aurait coûté plusieurs millions d’euros et que ce renoncement était donc aussi financier (synthèse du reportage sur FranceInfo.fr, publiée le 15 janvier 2020).
Les cahiers sont actuellement stockés dans les 101 Archives départementales françaises et répartis entre documents communicables et non communicables, selon que ces documents sont anonymisés ou pas ou qu’ils contiennent des données personnelles. Les cahiers sont classés par communes au sein de chaque département.
Il est effectivement possible d’accéder aux doléances papier, en centre d’archives départementales. Mais compte tenu de la situation sanitaire, l’accès n’est actuellement pas possible.
L’association Rendez les doléances s’est fixé trois grands objectifs:
Convaincre le gouvernement d’honorer ses engagements et de permettre ainsi à tous les Français de prendre connaissance de ce trésor national qui leur appartient;
Fédérer une vaste communauté de chercheurs partout en France pour traiter, analyser et restituer aux Français ce qu’ils ont dit de leur pays, des institutions, de leurs problèmes, de leur situation, des grands défis auxquels nous sommes collectivement et individuellement confrontés, mais aussi d’y retrouver et de partager leur vision pour l’avenir et leurs rêves pour les générations futures;
Partir de ce gigantesque corpus pour poursuivre les débats, les approfondir, imaginer le «monde d’après» et contribuer à refaire des citoyens des acteurs de leur destin.
Le 15 janvier 2021 marquera l’anniversaire des deux ans du Grand Débat National, et nous serons à moins d’un an d’une élection majeure pour notre pays. Nous pensons que dans cette perspective il est urgent que le Gouvernement respecte ses engagements et permette à l’ensemble des candidats de pouvoir accéder aux contributions faites par nos concitoyens.
Nous devons faire face à un temps de crise quasiment inédit. Crises sanitaire, sociale, économique et environnementale. Pour autant, la démocratie ne doit pas s’arrêter et nous devons continuer de participer à la vie de la cité et participer pleinement à l’élaboration de propositions adaptées à l’ampleur de ces crises pour bâtir ce qu’il est désormais convenue d’appeler «le monde d’après». Nous pensons justement que dans ces doléances figurent des idées pour demain et qu’il est temps de les entendre.
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