Lors de son discours de politique général, François Bayrou a fait savoir qu’il souhaitait « reprendre l’étude des cahiers de doléances » des Gilets jaunes.
À l’issue du « Grand débat », près de 20.000 cahiers, contenant plus de 200.000 contributions citoyennes, avaient été rédigés.
Malgré la promesse de rendre public ces contributions, leur accès n’est pas si facile.
Près de six ans après, les Gilets jaunes refont parler d’eux. Lors de son discours de politique général ce mardi 14 janvier, le Premier ministre François Bayrou a expliqué vouloir reprendre les cahiers de doléances, rédigés à la suite du « Grand débat national » lancé pour résoudre la crise des Gilets jaunes.
« Je suis certain que la promesse française suppose que nous puissions abattre le mur qui existe entre les uns et les autres. C’est la raison pour laquelle nous devrions reprendre l’étude des cahiers de doléances qui ont été présentés par les Gilets jaunes, de manière que s’exprime dans notre société (…) les attentes, souvent les plus inexprimées, qui sont celles des milieux sociaux, exclus du pouvoir », a ainsi déclaré le maire de Pau. Avant lui, Michel Barnier avait également évoqué cette idée alors qu’il était Premier ministre. L’occasion de revenir sur ce que sont devenus ces cahiers.
Suite à la crise des Gilets jaunes, Emmanuel Macron avait lancé, il y a six ans, le « Grand débat national ». En plus de ces moments d’échanges organisés un peu partout en France, le président de la République a enjoint les maires à ouvrir des « cahiers citoyens et d’expression libre », disponibles dans toutes les mairies. Les Français s’étaient alors pliés à cet exercice démocratique. À l’issue de cette période, 19.247 Cahiers Citoyens ont été comptabilisés, recueillant 225.224 contributions, rapporte une proposition de résolution déposée à l’Assemblée nationale.
Si Emmanuel Macron avait à l’époque promis la « transparence » du processus, les cahiers de doléances n’ont jamais été rendus publics. Depuis le « Grand Débat national », ils ont été placés dans les services des archives des 101 départements français. Une partie a été numérisée et les deux versions sont librement consultables auprès des archives départementales, sur place. Les cahiers qui n’ont pas été numérisés sont disponibles « sur dérogation, parce qu’ils contiennent des informations protégées par le code du patrimoine, au titre de la protection de la vie privée », explique un collectif de chercheurs dans une tribune au Monde, insistant sur l' »urgence démocratique » à rendre ces archives publiques et plus accessibles.
Gilets Jaunes : des députés veulent rendre les cahiers de doléances du Grand débat national accessibles à tous les citoyens
Face à l’inaction de l’État pour réaliser ce vœu, de nombreuses initiatives ont été menées pour que ces cahiers de doléances ne soient pas oubliés. Dans un documentaire de 2024 intitulé « Doléances », Fabrice Dalongeville, maire d’Auger-Saint-Vincent dans l’Oise, et la réalisatrice, Hélène Desplanques, font le tour des archives départementales pour redonner une existence publique à ces textes. Des collectifs de citoyens se sont également créés, à l’instar de l’association « Rendez les doléances », pour mettre en ligne les contributions en les anonymisant. Un moyen selon ces citoyens de « traiter, analyser et restituer aux Français ce qu’ils ont dit de leur pays, des institutions, de leurs problèmes, de leur situation, des grands défis auxquels nous sommes collectivement et individuellement confrontés. »
Au niveau national, une proposition de résolution transpartisane a par ailleurs été déposée en janvier 2024 à l’Assemblée nationale. Portée par la députée écologiste Marie Pochon, cette proposition demande de rendre public ce « trésor national », pour « qu’enfin la promesse présidentielle de 2019 soit tenue ». Auprès de TF1info, l’élue s’interrogeait alors : « Cela donne le sentiment qu’il y a une volonté de mettre sous couvercle ces doléances. Comment croire en la démocratie, si on ne la mène pas jusqu’au bout ? »